Réforme du régime québécois de santé et sécurité au travail (PL59)

Un recul inacceptable selon le conseil central

Québec, 23 mars 2021. – « Malgré les amendements soumis par le ministre, le projet de loi 59 sur le régime de santé et sécurité au travail constitue un recul inacceptable, » a déclaré Ann Gingras, présidente du Conseil central de Québec–Chaudière-Appalaches (CSN), lors d’une manifestation regroupant des représentants des syndicats de la région provenant autant du secteur privé que du secteur public.

« Le jupon du ministre dépasse allègrement. Son objectif premier avec ce projet de loi est de faire économiser des sous aux employeurs, » dénonce Ann Gingras. Selon les dires du ministre, il compte réduire les coûts de 4,3 G$ de façon cumulative sur dix ans. « Il veut donner plus de pouvoir à la CNESST et aux médecins des employeurs. On va accentuer la judiciarisation dans un système déjà passablement compliqué pour les personnes accidentées et malades du travail. Au lieu de réellement protéger les personnes salariées, le projet de loi complexifie et réduit considérablement l’accès au régime et à la réadaptation. C’est un détournement honteux de l’esprit de la loi! »

Le conseil central déplore également que le projet de loi 59 ne s’attaque pas du tout au mode de financement de la CNESST qui, en se basant sur l’expérience des milieux de travail, pousse à la contestation systématique de la part des employeurs. « La source de la judiciarisation elle est là, » explique Ann Gingras. « La perspective d’économies n’est que de la poudre aux yeux. Concrètement les coûts demeurent, c’est juste qu’on les transfert vers la collectivité via les assurances privées, le régime public de santé et de services sociaux et, en bout de ligne, l’aide sociale. »

« En matière de prévention, on aurait pu s’attendre à ce que le ministre fasse l’inventaire de ce qui fonctionne bien dans les milieux de travail et qu’ils étendent les bonnes pratiques à l’ensemble des secteurs. Malheureusement, ce n’est pas ce qui se passe du tout, » déplore David Bergeron-Cyr, vice-président de la CSN. « Au contraire, plusieurs milieux de travail dans des industries traditionnelles perdent des acquis et les mécanismes qu’on étend à tous les secteurs sont une version très édulcorée et faible de ce qui existait avant. »

Pire, l’ensemble des mécanismes devront faire l’objet d’un accord avec l’employeur, ce qui ajoute un nouvel élément de négociation dans les milieux de travail; ce sera source de conflits et d’affrontements puisque le projet de loi ne prévoit ni le nombre de personnes devant siéger au comité de santé et sécurité du travail ni le nombre minimum d’heures de libération de la personne représentante en prévention. Le ministre abandonne ainsi ses responsabilités en tant que législateur.

Notons également que le projet de loi 59 ne comporte que peu d’ouverture sur la question des maladies à caractère psychologique alors que l’épuisement professionnel, par exemple, est un véritable fléau dans les milieux de travail.

« La CSN ne peut pas cautionner de tels reculs en matière de santé et sécurité au travail, » prévient David Bergeron-Cyr.  « La mobilisation ne fait que commencer sur cet enjeu, on ne laissera pas passer ça.  Le ministre va nous trouver sur son chemin, c’est sûr. »

« Dans sa forme actuelle, le projet de loi 59 est inacceptable, » conclu Ann Gingras « le ministre doit retourner faire ses devoirs en mettant la santé et la sécurité des travailleuses et des travailleurs à l’avant-plan de ses préoccupations. Au-delà du coût financier, il doit prendre acte du coût humain et du coût social d’un système judiciarisé à outrance ».

Après un rassemblement devant le Ministère du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale, les manifestant-es se sont rendu aux bureaux du premier ministre sur la colline Parlementaire.