Hélène Fortin, présidente du syndicat des chauffeurs (photo : Archives)

Entrave à la liberté d’association

Le Tribunal administratif du travail annule la suspension de la présidente du syndicat des chauffeurs et sanctionne le RTC

 Québec, 16 juin 2025. – Dans une décision rendue jeudi dernier, le Tribunal administratif du travail (TAT) annule la suspension sans solde de trois mois imposée l’an dernier à Hélène Fortin, présidente du Syndicat du transport public du Québec Métropolitain (CSN) qui représente les chauffeurs du RTC, et ordonne le versement rétroactif du salaire et des avantages perdus et d’un montant de 15 000$ à titre de dommages moraux et punitifs. De plus, le TAT sanctionne le RTC et lui ordonne de verser 25 000$ de dédommagement au syndicat.

Entrave à la liberté d’association

Rappelons que la suspension d’Hélène Fortin, le 12 juin 2024, survenait après une importante enquête menée par une firme indépendante, à la demande du RTC, suite à une dénonciation pour harcèlement dans le cadre des activités syndicales, déposée par un ancien officier du syndicat. Pour le Tribunal, le RTC s’est arrogé un droit qu’il n’avait pas de s’ingérer dans les affaires syndicales, ce qui constitue une entrave aux activités syndicales découlant de la liberté d’association. Le Tribunal reproche notamment au RTC de ne pas avoir analysé d’alternatives et d’avoir imposé « une sanction d’une grande sévérité pour une personne au dossier disciplinaire vierge ».

Pour le TAT, « Le RTC n’a pas démontré de cause réelle et sérieuse de suspendre madame Fortin de ses fonctions de présidente qui ne serait pas un prétexte pour sanctionner ses activités syndicales ». La suspension de la présidente du syndicat pendant trois mois sans salaire était donc illégale et visait à « en faire un exemple », sans toutefois être parvenue à « démontrer une cause réelle et sérieuse au sens de la loi, d’imposer cette mesure ».

Pour le TAT, permettre une telle enquête sur le travail de l’exécutif syndical « équivaudrait à contourner la règle fondamentale de l’autonomie syndicale et à lui permettre de s’ingérer sans réserve et décider de la manière dont un syndicat administre ses affaires internes ». Le Tribunal ajoute que, ultimement, « devant une simple allégation de harcèlement, il lui serait ainsi permis de choisir ses représentants syndicaux en sanctionnant ceux qu’il considère inadéquats jusqu’à les retirer de leur poste, comme dans la présente affaire, faisant fi du choix des salariés qui les ont élus et, du coup, du droit à la liberté d’association ».

 

Gaspillage de fonds publics

Selon des documents obtenus suite à une requête en accès à l’information, l’enquête commandée par le RTC a coûté au minimum 172 827,98$. En ajoutant les frais de libérations des témoins patronaux, on dépasse le 200 000$ auquel il faut ajouter les quelque 40 000$ de dommages ordonnés par le tribunal. Au total, les frais juridiques dans divers dossiers au RTC se sont élevés à 842 717,29$ en 2024. Pour le syndicat, il s’agit d’un gaspillage éhonté de fonds publics.

 

Le RTC doit changer ses pratiques

Pour le syndicat, le RTC doit prendre acte du jugement et changer ses pratiques. Il est clair que la direction s’attaque directement à la présidente du groupe des chauffeurs et à la structure syndicale. Encore la semaine dernière, malgré la décision rendue par le TAT, le RTC poursuivait son ingérence dans les activités syndicales. En effet, deux gestionnaires du RTC viennent de demander à une employée de faire un rapport écrit sur la teneur d’une discussion qu’elle a eu avec la présidente du syndicat en lui mentionnant qu’ils l’ont vue avoir une discussion avec elle sur les caméras de surveillance.

Le syndicat dénonce également les deux poids, deux mesures, de la direction du RTC. En effet, deux chauffeures ont déposé des plaintes similaires contre des gestionnaires du RTC sans qu’il n’y ait ni enquête ni sanction, sous prétexte que les plaignantes n’avaient pas signé le formulaire de plainte officiel, et ce, quelques semaines avant la dénonciation dans le présent dossier. Pourtant, dans la présente affaire, l’employeur a vu l’opportunité d’atteindre le syndicat… même si la personne dénonciatrice a refusé de faire une plainte officielle.

Notons pour terminer que le RTC n’a toujours pas publié la décision en une de son site internet comme l’ordonnait le TAT.

 

À propos

Le Syndicat des employés du transport public du Québec Métropolitain inc. regroupe 935 chauffeurs. Il est affilié à la FEESP–CSN, qui regroupe 69 000 membres répartis dans 425 syndicats dans les services publics et parapublics ainsi qu’au Conseil central de Québec–Chaudière-Appalaches (CCQCA-CSN) qui compte 45 000 membres dans 240 syndicats de toutes provenances. Pour sa part, la CSN compte plus de 330 000 membres syndiqués provenant tant du secteur privé que public.