Une année bouleversante qui achève

Personne n’aurait pu prédire le déroulement de l’an 2020 surtout que le tout s’étire jusqu’au Jour de l’An et plus encore. Le tout est venu teinter notre façon de militer, voire notre façon d’être. Malgré la situation pandémique, la vie continue et les défis font partie de notre quotidien.

Bon nombre de syndicats ont renouvelé leur convention collective malgré les difficultés. Certains ont eu recours aux moyens de pression et même, aux arrêts de travail. Dans ce cadre, pensons aux travailleurs de Mécart qui, durant l’été, ont réussi à renouveler justement leur convention de façon extrêmement satisfaisante. Ils ont su mettre la pression nécessaire pour y arriver.

Cette mobilisation s’est manifestée dans d’autres secteurs aussi. Les travailleuses et travailleurs du secteur public dont la convention est échue depuis le 31 mars dernier, augmenteront la pression au cours des prochaines semaines, des prochains mois afin d’obtenir une reconnaissance et un réajustement qui tarde cruellement au niveau des conditions de travail et des conditions salariales. Alors que le premier ministre ne cesse de remercier les « anges gardiens », ces hommes et ces femmes qui se dédient à la population tous les jours, la gratitude de ce dernier s’arrête dès la fin des points de presse. Nous l’avons dit à plusieurs reprises au cours des dernières années, malgré les compressions budgétaires et les réorganisations tous azimuts à répétition, ce sont les salarié-es qui ont tenu à bout de bras les services publics, et ce, souvent au détriment de leur propre santé. Les services publics s’écroulent, la publicité de la CSN incarne parfaitement cette réalité et ça doit cesser. Nous devons solidairement épouser la lutte du secteur public. Il s’agit d’un rendez-vous incontournable pour 2021.

Un autre rendez-vous qui nous attend est la réforme des lois en santé-sécurité du travail, annoncée par le ministre du Travail, Jean Boulet. Plusieurs l’incitaient à procéder à cette réforme. Nous n’étions pas du lot. « Je connais les problèmes dans ce domaine », nous avait-il répété. En soi, cela devait alerter des dangers à venir puisque le ministre Boulet est un ancien procureur patronal. Les problèmes que lui voit ne sont certainement pas les problèmes que nous connaissons. 

Comprenez-moi, ce n’est pas une attaque frontale, mais c’en est une qui est extrêmement pernicieuse. La réforme est assez subtile qu’elle laisse croire à certains qu’ils ont des gains alors que ce n’est qu’un mirage. 

D’abord, dans la Loi sur la santé et la sécurité du travail (LSST), alors que 87 % des personnes ne sont pas encore couvertes par les groupes prioritaires (GP), ce qui donnerait de multiples outils de prévention aux travailleuses et aux travailleurs, le ministre se réjouit d’avoir enfin étendu partout les GP. Quel infâme show de boucane ! D’abord il enlève les GP aux secteurs déjà reconnus pour étendre partout une version tellement diluée qu’on voit facilement le jupon qui dépasse. Le jupon étant l’objectif principal : que le régime coûte moins cher, beaucoup moins cher aux employeurs. Si vous aviez pensé ne serait-ce qu’un instant que l’objectif serait la prévention, oubliez cela. Il introduit aussi des catégories de risques, de faible à élevé, pour déterminer les besoins. Il faut quand même avoir du culot de considérer que le secteur de la santé est dans les risques faibles, surtout en temps de COVID-19. D’autant plus qu’il largue la santé publique pour laisser la place à d’autres médecins dits spécialistes. Les médecins des employeurs ? Ça, l’histoire ne le dit pas encore.

Monsieur le ministre jubile en appelant sa réforme une « réforme féministe ». C’est une honte puisque c’est plutôt une « réforme sexiste ». D’abord en règlementant l’ensemble des secteurs dans les groupes prioritaires, car les 87 % non règlementés sont majoritairement féminins. De plus, sa version édulcorée entre en vigueur en…. 2025. Il se targue de maintenir le programme « Maternité sans danger », mais avec des modifications substantielles. Alors qu’actuellement le médecin traitant a le dernier mot, voilà qu’une panoplie de normes uniformes seront introduites par la CNESST pour déterminer l’acceptation des demandes ou pas. Une réforme féministe Monsieur le Ministre ? Pas une minute !

Du côté de la Loi des accidents de travail et maladies professionnelles (LATMP), la volonté de réduire les coûts est omniprésente. En cas de litige avec une décision du Bureau d’évaluation médicale (BEM), ce n’est plus la décision du médecin traitant, mais celle du médecin de la CNESST qui prévaut. On sabre dans la réadaptation, on pénalise les travailleurs de 60 ans et je pourrais continuer encore et encore. Depuis longtemps, nous demandons une mise à jour de l’annexe des maladies professionnelles en incluant, entre autres, la question de l’épuisement professionnel ou de la détresse psychologique. Ce qu’il reconnaît est le cancer des poumons chez les pompiers et le stress post-traumatique, mais accompagné par une foule de balises. En ce qui concerne l’annexe, il l’enlève complètement et donne la responsabilité à un comité de scientifiques qui seront nommés par le…. gouvernement.

Depuis 1980, nous avons vu naître quelques réformettes des lois, mais une réforme en profondeur, c’est une première. Si cette réforme est adoptée, elle nous suivra pour longtemps. Le ministre ne s’attaque ni aux problèmes de fond qu’est la judiciarisation du régime ni aux effets pervers qui découlent d’un mode de financement désuet. Le ministre avait un rendez-vous qu’il ne pouvait pas se permettre de manquer et il l’a raté de façon magistrale. De notre côté, nous ne pouvons nous permettre de laisser passer cette réforme imbuvable dans sa forme actuelle. Le fait d’enlever des protections dans les milieux de travail qui existent depuis maintenant 35 ans et de faire une réforme sur le dos des personnes victimes d’accidents de travail ou de maladies professionnelles est inconcevable. 

Nous allons devoir nous faire entendre, de faire entendre la voix des personnes qui subissent les effets de la judiciarisation de ce régime tordu au fil du temps par des décisions rigides des tribunaux et de la CNESST. C’est un système tordu qui s’est érigé autour de la CNESST et sur cela, le ministre garde les yeux bien fermés. Janvier et février 2021 serviront à ce que nous puissions collectivement les lui ouvrir.

Je termine, au nom de l’équipe du conseil central, en vous souhaitant de belles Fêtes, malgré la conjoncture. Du repos, de la santé et décidément, nous avons rendez-vous en 2021. 

Joyeuses Fêtes !


Salutations à deux camarades de cœur

Malgré la pandémie qui sévit, la vie continue et des changements surviennent. Nous trouvions important de prendre un temps d’arrêt pour souligner l’implication de deux personnes qui ont, sans cesse, milité pour l’amélioration du quotidien de bon nombre de personnes.

Louise Labrie

D’abord, Louise Labrie, militante de première heure des Centres de la petite enfance. Elle quitte la présidence de son syndicat pour de nouveaux défis, et ce, après plus de 30 ans d’implication de tous ordres. Louise était aussi membre du comité des femmes depuis plusieurs années. Féministe dans l’âme, elle était de tous les combats. Femme de cœur et femme de raison, Louise poursuivra son implication en tant que salariée à la CSN. Sa présence est d’ailleurs venue teinter les travaux du conseil central à plus d’une reprise.

Gilles Gagné

Gilles Gagné, président du Syndicat des travailleuses et travailleurs des centres d’hébergement privés de la région de Québec (CSN), prendra le chemin d’une retraite bien méritée dès le 23 décembre. Après plus de 20 ans à revendiquer des conditions de travail et salariales décentes pour les travailleuses et travailleurs dans les CHP, ce militant acharné et dévoué entamera une nouvelle aventure. Ceux et celles qui ont eu la chance de croiser Gilles ont pu constater la passion qui l’habite.

Au nom du conseil central, je veux saluer ces deux militants d’exception et leur transmettre toute notre reconnaissance pour les années consacrées à lutter contre les injustices et à dénoncer l’inacceptable. Merci!


Extrait du numéro de décembre 2020 du journal Le Réflexe